Barry c’est fini, Hafley en piste !

Les cheeseheads le souhaitaient et redoutaient que cela ne se fasse pas mais Matt LaFleur a étonnamment tranché dans le vif : le coordinateur défensif Joe Barry a été démis de ses fonctions il y a une semaine. Depuis, les Packers ont enchaîné les interviews de jeunes coordinateurs plutôt tournés sur la défense contre la passe. Il y a quelques jours, ils ont enfin jeté leur dévolu sur Brian Hafley, head coach de Boston College en NCAA.

BARRY-CI LA SORTIE

Malgré l’habituel soubresaut de fin de saison de la défense des Packers, malgré le fait qu’il soit apprécié de la plupart des joueurs, Joe Barry n’a pas pu sauver sa tête à la fin de son bail de 3 ans en tant que coordinateur défensif.

Et c’est comme si la belle saison offensive 2023 des Packers avait montré à LaFleur que, oui, il était possible de faire progresser rapidement une escouade.

Au bout de 3 ans, LaFleur était en capacité de juger l’ensemble de l’oeuvre de son DC et surtout le manque de progrès. Et moi de même.

J’attendais cette saison pour savoir si notamment, les schémas tactiques allaient évoluer. Mais à de trop nombreuses reprises, j’ai revu cette défense alignée en 2-4-5 (avec front-4 hyper écarté) qui se faisait trouer au sol. Ou revu des receveurs lambda faire leur festin dans le milieu du terrain par des tracés « cross » en profitant à la fois de la « zone coverage » et de CB placés à 10 mètres de leur WR, à contre-courant des qualités de l’effectif, la star Jaire Alexander en tête.

Le point de rupture a eu lieu pour moi dans ce tryptique de fin de saison (semaines 14-15-16) où la défense fut apocalyptique contre Giants, Buccaneers et Panthers, permettant aux QB adverses (dont deux rookies) de faire leur meilleur match en carrière ; tout comme Desmond Ridder des Atlanta Falcons en semaine 2 d’ailleurs.

Et quand ce n’était pas les QB qui brillaient, c’étaient les RB adverses avec 4 matchs cette année où GB a encaissé + de 200 yards à la course : @Falcons, vs Lions, @Steelers, @Giants.

Ce qui sauvait les saisons de Barry, outre des sursauts de fin de saison, ce sont des bilans statistiques moyens sans être mauvais :

  • 2023 : 10ème en pts, 17ème en yards
  • 2022 : 16ème en pts, 16ème en yards
  • 2021 : 13ème en pts, 9ème en yards

Mais plus que ces statistiques de moyenne correctes, ce sont certaines statistiques médiocres (5 yards encaissés par course en 2022 : « record » de franchise) et surtout l’impression visuelle qui montraient que la défense ne serait pas une force de GB sous la coupe de Joe Barry, même avec un changement de QB, même avec 4 premiers tours de draft défensifs ces 3 dernières années.

D’autres chiffres collaient plus à la réalité de ce que nous voyions. Ainsi, l’évaluation statistique DVOA (Defense-adjusted Value Over Average) jauge chaque jeu au regard de la « valeur » du yard (+ important en 3ème tentative qu’en 1ère), du taux de succès moyen de la situation et de l’ajustement de l’évaluation au regard de la valeur de l’adversaire, du moment du match, du score ou du temps restant. Eh bien, en DVOA défensif, les Packers de Joe Barry étaient :

  • DVOA défensif 2023 : 27ème
  • DVOA défensif 2022 : 20ème
  • DVOA défensif 2021 : 22ème

Bref, l’impression générale est que Joe Barry n’exploitait pas à plein le potentiel sportif de l’effectif, symbolisée par des actions où des joueurs, spécialement les ILB semblaient complètement paumés sur le terrain face à la situation de jeu.

Il était donc temps de modifier le logiciel défensif trop précautionneux envers le « big play » et de laisser de côté l’aspect passif de cette défense trop coûteux en énergie et trop défavorable au chronomètre ; la défense ne survivant que par exploits personnels de joueurs gagnant leurs 1-contre-1.

HAFLEY, LA CHANCE D’UN OUTSIDER

Pour changer de logiciel, les noms évoqués dans les interviews montraient déjà une tendance. Pas de gros noms, pas de figure du coaching en NFL mais un profil jeune ascendant aux qualités insoupçonnées et plutôt axé sur la défense aérienne.

Évidemment, c’est un nom complètement passé sous les radars des journalistes américains qui est sorti du chapeau : Brian Hafley.

Hafley a une expérience mixte d’entraîneur de poste en NFL (coach des lignes secondaires des Browns en 2014 et 2015, coach des lignes secondaires des 49ers de 2016 à 2018) et de coach principal en NCAA (université) : DC à Ohio State en 2019, head coach à Boston College de 2020 à 2023.

Le profil de cet entraîneur correspond à un changement complet si on s’en tient à son courant de pensée défensif.

Avec Hafley, fini la peur du big play et de la Cover-2 avec 2 safeties à 20-25 yards de la ligne de mise en jeu.

Place à un style agressif avec des défenseurs dans leur ensemble beaucoup plus près de la ligne de mise en jeu, quasiment tout le temps dans les 10 yards de la ligne de mise en jeu. En cela, je vous recommande de regarder la défense des Kansas City Chiefs cette année du coordinateur défensif Steve Spagnuolo, par exemple la finale AFC face aux Ravens.

Ce style + agressif amène + de bonhommes sur la ligne de mise en jeu. Ainsi, les schémas défensifs qu’Hafley a emmenés sont du format 4-3. Passera t-on à ce format chez les Packers ? Il est vrai que Kenny Clark a toujours été selon moi mal utilisé en NT de 3-4 et semble naturellement plus être un DT 4-3. Il a récemment bénéficié de l’apport d’un joueur beaucoup plus massif en la personne de T.J. Slaton, mieux typé NT. Quid de Slaton en format 4-3 ? À voir ; néanmoins s’il a un gabarit massif, il a un style disruptif qui cherche à attaquer l’espace plutôt que contenir des OL.

Rien n’est moins sûr concernant le schéma 4-3 mais l’effectif est en capacité de s’adapter, les pass-rushers Van Ness et Gary ayant été des DE à l’échelon universitaire. Le schéma 4-3 implique donc 3 LB derrière une DL de 4 joueurs, avec un rôle central pour le MLB. C’est peut-être dans ce sens qu’un Quay Walker pourrait s’épanouir en électron libre cover/rusher. Il existe bien sûr des variantes de 4-3 qui peuvent tout aussi bien être des 4-2-5 par exemple.

Le style prôné par Hafley demande également + de « press man coverage » de la part des CB, c’est-à-dire des CB au contact de leurs attaquants lors de la mise en jeu, adapté aux qualités d’Alexander, Stokes et Valentine, les CB titulaires de 2024 pour le moment.

Hafley a côtoyé tout au long de sa carrière de coaching des grands noms à ce poste : Darrell Revis (Hall of Famer en 2023) quand il fut assistant défensif à l’université de Pittsburgh en 2006, Ronde Barber (3 fois All-Pro, NFL team des années 2000) quand il fut assistant DB coach chez les Tampa Buccaneers en 2012 ou encore Richard Sherman (3 fois All-Pro, NFL team des années 2010). Ce dernier a d’ailleurs eu des termes élogieux sur Hafley quand il fut interrogé sur son recrutement par les Packers.

Au niveau de ses accomplissements, Hafley a été le DB coach des Buccaneers en 2013 (n°4 NFL au niveau des INT) et DB coach des Browns en 2014 (n°2 NFL au niveau des INT). Son plus haut fait d’armes est d’avoir participé, en tant que co-coordinateur défensif et DB coach au redressement défensif spectaculaire d’Ohio State en 2019, une des grosses écuries du College Football. Ainsi, la draft 2020 verra 3 défenseurs d’Ohio State pris au 1er tour de draft dont Chase Young (DE), 2ème pick général, et Jeff Okudah (CB), 3ème pick général.

Hafley a aussi été DB coach des 49ers de 2016 à 2018. Richard Sherman (CB) en garde un beau souvenir mais les performances défensives aériennes des 49ers durant cette période étaient médiocres. Cependant, il est à noter qu’il fut recruté par le head coach Chip Kelly qui fut remplacé en 2017 par l’actuel head coach Kyle Shanahan, et que ce dernier l’a conservé (Hafley fut alors le seul élément du coaching défensif Niners à avoir été conservé par Shanahan).

Sa dernière expérience est celle de head coach à l’université de Boston College. Dans une franchise atone depuis une quinzaine d’années (et la saison 2007 emmené par le QB Matt Ryan), Hafley n’a pas su redresser la barre d’une franchise confrontée de plus en plus à la concurrence des grosses écuries universitaires bien établies de la SEC et de la BIG10. Il tire de son bail de 4 ans dans le Massachussets un bilan < à 50 % (2 saisons positives, 1 saison à bilan de 50 % et 1 saison catastrophique) et la participation à 3 bowls universitaires.

Mais on le voit avec des exemples comme Spagnuolo cité plus haut (actuel DC des Chiefs et ancien HC de catastrophiques Rams au début des années 2010), certains profils de coachs peuvent faire de très bons coordinateurs et de mauvais head coachs. On espère que Hafley s’inscrira dans cette mouvance.

Le schéma favorisé pour les lignes secondaires sous la férule de Hafley est de la cover-1 avec un « free safety center-field », c’est-à-dire un FS seul placé en profondeur au centre du terrain et capable de couvrir l’ensemble de la largeur du terrain grâce sa vitesse et à sa vision. Dès lors, les Packers semblent tout désignés à privilégier ce poste à la prochaine free agency et/ou à la prochaine draft. Cette tactique de cover-1 se mue le plus souvent en cover-0 quand la défense de Hafley est acculée en redzone.

Quoi qu’il en soit, le profil de Hafley est moins incongru que celui de Joe Barry lors de son recrutement : son âge s’intègre avec la moyenne d’âge global des coachs et son pedigree est plus prometteur. Mais surtout, avec ce recrutement, les Packers semblent tirer le frein à main complet pour une refondation défensive aussi excitante qu’inconnue. Elle semble répondre à des soucis que j’ai trop souvent évoqués ici ou sur le podcast des Têtes de Fromage : le besoin d’un maillage défensif + resserré et de CB + agressifs.

On saura prochainement quels éléments du coaching défensif de Joe Barry seront conservés ou non (plus sûrement la 2ème solution). Les performances défensives de la prochaine saison nous indiqueront si en effet, nous avions raison de croire que oui, le potentiel de cette défense, constituée de nombreux 1ers tours de draft, n’était pas pleinement exploité.

GreenBayPackersFrance

4 Comments

  1. DavidBrillac

    Je n’ai jamais entendu parler de lui, mais comme tous les autres candidats interviewés, à part l’ancien coach des Chargers.
    La tendance est au jeunisme, on espère que la greffe prendra, et qu’il fera passer un cap à tous ces premiers tours qui stagnent à commencer par Gary et son contrat à 100 millions de dollars pour une si petite production depuis le début de sa carrière !
    S’il réussit à donner une vraie défense aux Packers, tous les espoirs seront permis.

  2. Laogurdr

    Moi je laisse le bénéfice du doute franchement je trouve qu’il a des bons résultats avec ses défenses NCAA donc à voir j’y crois j’espère que la défense va enfin franchir un cap.
    Pour rebondir sur ce que tu dis @davidbrillac peut-être que Gary va avoir plus de snaps car Barry ne le faisait que 60% – 65% des snaps quand tous les meilleurs rushers de la ligue en jouent minimum 80% – 85% au bout d’un moment tes tops joueurs pour qui tu sors le chéquier il faut peut-être les foutre sur le terrain aussi

  3. DavidBrillac

    @Laogurdr effectivement le temps passé sur le terrain compte aussi dans cette stat’, mais je n’en démords pas, sur ses 5 premieres saisons, Gary c’est 31 sacks 🤣 le Predator Matthews c’était 50 sacks 🙂 et le maître absolu le ministre White c’était 81 sacks🥳.
    Moyenne (6)🤣 (10)🙂 (16)🥳
    Clairement il est en sous-production pour un gars à 24 millions la saison.
    Heureusement son contrat de 96 millions n’est garanti qu’à hauteur de 38 millions de dollars.

  4. Guile

    Il fallait absolument changer car Barry n’était pas fait pour le poste et il n’avait pas la capacité d’adapter son schéma de pensée et d’organisation aux caractéristiques des joueurs qu’il avait à sa disposition.

    Franchement, je n’en pouvais plus de voir et revoir une ligne de devant avec uniquement 2 gros (en 2-4-5 comme tu dis GBPF) alors qu’à chaque fois la défense se faisait démonter.

    Alors, comme beaucoup, je ne connais pas le nouveau mais laissons lui essayer autre chose. Il peut passer en 4-3, faire jouer les mecs en tutu, je m’en fiche pour peu que ça joue sur les forces des joueurs, qu’il n’y a plus de CB à 10 yards de leur receveur pendant la moitié de la partie, des S à l’autre bout du terrain, de la défense préventive en mode porte de saloon. Bref, les joueurs sont plutôt durs sur l’homme et agressif donc jouons comme ça.

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